Deuxième type : le miracle rhétorique dans le Coran


Dr `Abd Allah Ibn ‘Abd Al-‘Azîz Al-Moslih

Traduit en : العربية English

Ce type de miracle réside dans la combinaison entre l’éloquence des termes et la pertinence du sens, et aucun orateur n’est jamais parvenu à l’imiter ou à s’en rapprocher, et le grand savant as-Suyûtî a même nié qu’un membre de Qoraych ait seulement tenté de le faire. Allah, exalté soit-Il, dit vrai :

« Alif, Lām, Rā. C’est un Livre dont les versets sont parfaits en style et en sens, émanant d’un Sage, Parfaitement Connaisseur ». (Coran 11/1)

En effet, Allah a défié les mécréants de la tribu de Qoraych et des autres tribus arabes, ainsi que les hommes et les djinns, de produire un tel chef-d’œuvre, et personne ne put relever le défi, bien que les Qoraychites aient atteint le sommet de l’art rhétorique au moment où le Coran fut révélé, étant donné qu’Allah avait fait de leur dialecte le plus beau et plus éloquent et qu’ils faisaient office de juges pour départager tous les Arabes dans les joutes poétiques qui avaient lieu dans leurs marchés comme ‘Ukâz, Dhû al-Madjna et Dhû al-Madjâz.

C’est pourquoi il leur lança un puissant défi, eux qui étaient les plus prompts à le traiter de menteur et à nier ses arguments, en commençant par le défi le plus difficile à relever, à savoir celui de produire une œuvre semblable au Coran, dont ils parlaient pourtant la langue et dont ils comprenaient les sens. Puis il modéra son défi en leur demandant de produire dix sourates semblables, fussent-elles fictives, mais ils ne le purent point. Il finit par les défier de produire une seule sourate de ce type, et ils restèrent également impuissants.

Un savant a dit : « Les paroles que le Prophète élu (Salla Allahou Alaihi wa Sallam) a récitées devant les Arabes et qui les ont laissé impuissants à en produire de semblables constituent un miracle plus prodigieux et ont une signification plus profonde encore que le fait de ressusciter les morts ou de guérir les aveugles-nés et les lépreux. En effet, il s’adressait à des maîtres de l’éloquence et de la rhétorique dans une langue qu’ils comprenaient, et par conséquent, leur impuissance à faire de même était beaucoup plus surprenante que l’impuissance de ceux qui avaient vu ‘Issa [Jésus (Alaihi As-Salam)] ressusciter les morts ou guérir les aveugles-nés et les lépreux, du fait que ces derniers ne maîtrisaient pas cette science. Cette incapacité des Qoraychites à relever un défi dans leur propre spécialité avait donc pour but de fournir une preuve irréfutable de l’authenticité de la mission prophétique de Mohammad  (Salla Allahou Alaihi wa Sallam) ».

Ce miracle du Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam) est donc plus édifiant que les miracles des prophètes qui l’ont précédé, et qui tous ont défié leurs peuples avec des miracles qu’ils n’auraient de toute façon jamais pu imiter. D’autre part, ceux qui ont été témoins de leurs miracles sont morts, et il ne reste plus que les récits qui nous en sont parvenus, et qui ne peuvent avoir la valeur d’un témoignage oculaire. Alors que ce miracle du Coran continue à défier à travers les siècles l’ensemble des lettrés arabes, qui restent incapables de produire une seule sourate semblable aux siennes, et les gens en tout temps et en tout lieu sont obligés de l’admettre. Allah, exalté soit-Il, dit : « Si vous avez un doute sur ce que Nous avons révélé à Notre Serviteur, tâchez donc de produire une sourate semblable et appelez vos témoins, (les idoles) que vous adorez en dehors d’Allah, si vous êtes véridiques »(Coran 2/23). Il leur a donc accordé un délai pour qu’ils demandent l’aide des spécialistes de la rhétorique et de l’éloquence.

Al-Bayhaqî a dit : « Cela est une preuve irréfutable qu’il n’a dit aux Arabes : “Produisez quelque chose de semblable si vous le pouvez, et vous ne le pourrez pas” que parce qu’il avait la certitude qu’ils en seraient incapables. Or, cette certitude ne peut avoir pour cause que son Seigneur, Qui lui a révélé cela, et en la Parole duquel il a eu confiance». En effet Allah, exalté soit-Il, dit : « Si vous n’y parvenez pas et, à coup sûr, vous n’y parviendrez jamais » (Coran 2/24).

D’autre part, Allah a dévoilé les secrets de leur cœur, et expliqué à Son Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam) qu’ils savaient que cela était la Vérité et qu’il était impossible que cela provienne d’un être humain, mais que c'étaient l’arrogance, la jalousie et l’obstination qui les empêchaient d’admettre sa prophétie. Allah, exalté soit-Il, dit : « Or, vraiment ils ne croient pas que tu es menteur, mais ce sont les versets (le Coran) d’Allah, que les injustes renient » (Coran 6/33).

C’est ainsi qu’Aboû Djahl commenta le songe de ‘Atika, fille de ‘Abd il-Muttalib en disant à al-‘Abbâs (Radiya Allâhou ‘Anhou) : « Nos clans se sont livrés à une rivalité sans merci comme deux chevaux de courses. Depuis fort longtemps nous luttons pour la gloire, mais lorsque que nous sommes arrivés à égalité, vous avez affirmé : nous avons un prophète. Il ne manquait donc plus que vous prétendiez : nous avons une prophétesse ».

Et malgré les dénigrements des Qoraychites et leur hostilité, leurs chefs se faufilaient la nuit pour aller écouter la récitation du Coran par le Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam), car ils étaient fascinés et éblouis par sa beauté. Ibn Hichâm rapporta qu’Abû Sufyân Ibn Harb, Abû Djahl Ibn Hichâm et al-Akhnas Ibn Charîq sortirent une nuit pour aller écouter le Coran récité par le Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam), alors qu’il passait la nuit en prière chez lui. Chacun d’entre eux prit une place sans que les autres ne la connaissent, et ils se mirent à écouter. À l’aube, ils se séparèrent et se retrouvèrent en chemin. Ils se blâmèrent alors mutuellement, se disant les uns aux autres : « N’y retournez pas, car si un faible d’esprit de votre entourage vous voyait, il pourrait penser que Mohammed professe la vraie  religion ». Puis ils rentrèrent chez eux, et la seconde nuit, chacun retourna à sa place et se mit à écouter le Coran. Et à l’aube, ils se séparèrent et se retrouvèrent en chemin. Ils se dirent alors les uns aux autres : « Ne partons pas d’ici avant de nous être engagés à ne jamais y retourner », ils s’y engagèrent puis se séparèrent. En effet, l’éloquence du Coran, la beauté de son style et la subtilité de sa langue eurent un impact tel sur eux qu’ils ne purent y faire face qu’en s’engageant solennellement à ne pas retourner l’écouter. Et ce n’était rien d’autre que l’arrogance et la suffisance qui les détournaient de la Vérité.

Mentionnons aussi ‘Utba Ibn Rabî’a qui, lorsqu’il fut envoyé par les Qoraychites au Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam) pour lui demander de cesser d’insulter leurs idoles et de mettre des limites à sa prédication, lui proposant en échange des butins. Lorsqu’il eut terminé de parler, le Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam) lui demanda : « As-tu terminé, Abû al-Walîd ? 

– Oui, répondit-il.

– Tu es prêt alors à m’écouter ? lui demanda le Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam).

– Parle, lui dit-il.

Et le Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam) récita :

« Au Nom d’Allah le Clément le Miséricordieux, Hā, Mīm.  C’est une Révélation descendue de la part du Tout Miséricordieux, du Très Miséricordieux. Un Livre dont les versets sont détaillés et clairement exposés, un Coran arabe pour des gens qui savent… […] S’ils s’en détournent, alors dis-leur : “Je vous ai avertis d’une foudre semblable à celle qui frappa les Aad et les Thamūd” » (Coran 41/1-13).

Abû al-Walîd, qui était adossé, s’assit alors et mit la main sur la bouche du Prophète (Salla Allahou Alaihi wa Sallam), et au lieu de rejoindre les mécréants de Qoraych qui l’avaient envoyé et étaient réunis à Dâr an-Nadwa, retourna chez lui et en chemin, rencontra Abû Djahl qui lui demanda : « Ô Abû al-Walîd, où vas-tu comme ça ? Et que t’arrive-t-il ? 

– Laisse-moi, répondit-il l’autre, car je viens d’entendre des paroles comme jamais je n’en ai entendu de semblables, qui ne sont ni de la poésie, ni de la magie, ni de la divination, des paroles douces et élégantes comme une branche d'arbre à la fois fructueuse et feuillue ». Il était en effet abasourdi par la beauté d’une telle éloquence.

Le philosophe britannique Thomas Carlyle, qui avait étudié la langue arabe, s’est interrogé, en présence des oulémas d’al-Azhar : « Pourquoi donc est-il impossible de composer une œuvre semblable au Coran ? Car il n’y a pas de poète ou d’écrivain qui n’aient trouvé plus éminent et plus éloquent qu’eux.

– Bien, essayez donc de décrire l’immensité de l’Enfer, répondirent-ils ».

Et il écrivit quelques phrases : « L’Enfer est plus vaste que ce que vous pensez, et même si tous les hommes et les djinns étaient réunis, il pourrait les contenir ». Les Azharis se mirent à rire, et il leur demanda : « Que dit le Saint Coran ? 

– Allah, exalté soit-Il, dit : “Le jour où nous dirons à l’Enfer : ‘es-tu rempli ?’ Il dira : ‘Y en a-t-il encore ?’”(Coran 50/30) répondirent-ils.

– Personne ne pourrait prononcer de telles paroles ! s’exclama alors Carlyle. »

En effet le verset, dans les deux sens possibles de l’interrogation, est un miracle. En effet, si l’interrogation sous-entend la confirmation, le sens est qu’il reste encore de la place en Enfer, et si elle sous-entend la négation, le sens est qu’il n’en reste plus car il les contient déjà tous.

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